Origines historiques des harkis
Un harki vétéran de la Seconde guerre mondiale
indigènessont mis sur pied et participent aux opérations de conquête de l'Algérie aux côtés des unités métropolitaines. En 1856, trois régiments de tirailleurs algériens sont créés dans chacune des provinces de l’Algérie française et font partie intégrante de l’armée française. Ces tirailleurs s’illustrent ensuite dans la plupart des campagnes du Second Empire et de la IIIe République. C'est alors que naît le terme de
harki. Dans certaines familles musulmanes, comme celle du bachaga Boualam, une vraie tradition militaire tournée vers la métropole se développe.
Les harkis réapparaissent dans l'Aurès vers la fin de 1954, quand Jean Servier met en place des harkas pour contrer l'implantation des indépendantistes algériens. Ils sont les militaires pro-français les plus précaires et les moins rémunérés, mais aussi les plus nombreux, et leur nombre augmente fortement dès le début de la guerre d'Algérie
En , il n'existe encore que 70 harkas officielles, regroupant 2 186 harkis. Une définition des harkas naît en mai 1957 dans une note de service du 5e bureau de l’état-major du commandement supérieur interarmées :
La harka est une formation levée pour des opérations déterminées et pour un temps limité. […] La mise en œuvre des harkas doit normalement se situer dans le cadre local. Leur participation à des opérations extérieures à leur périmètre de recrutement doit donc être exceptionnelle et de durée limitée. En aucun cas les harkas ne doivent être engagées isolément.
Le général Challe commande les forces françaises à partir de fin 1958. Il instaure des commandos de chasse, qui incluent des harkis en petit nombre et dont la mission principale est de traquer les katibas du FLN. En un an, l'effectif passe d'environ 10 000 harkis à plus de 60 000. Le général de Gaulle accepte la proposition de porter l’armée au niveau nécessaire pour défendre tout le territoire, en enrôlant massivement des musulmans, bien qu'il soit fermement opposé à l'intégration des musulmans dans les forces françaises
Le nombre de harkis augmente fortement dans la première partie de la guerre, et baisse à la même vitesse à l'approche de l'indépendance algérienne. Il est particulièrement difficile d'estimer le nombre de harkis engagés : l'armée française leur fournit un contrat journalier, souvent verbal, et ne les recense pas. Les historiens estiment donc leur nombre en étudiant l'utilisation des crédits de l'armée destinés à leur recrutement ; cependant, ces derniers sont parfois utilisés à d'autres fins et en particulier pour rétribuer des informateurs ponctuels.
Le nombre de harkis augmente fortement dans la première partie de la guerre, et baisse à la même vitesse à l'approche de l'indépendance algérienne. Il est particulièrement difficile d'estimer le nombre de harkis engagés : l'armée française leur fournit un contrat journalier, souvent verbal, et ne les recense pas. Les historiens estiment donc leur nombre en étudiant l'utilisation des crédits de l'armée destinés à leur recrutement ; cependant, ces derniers sont parfois utilisés à d'autres fins et en particulier pour rétribuer des informateurs ponctuels.
Les harkis sont une classe à part des soldats musulmans de l'armée régulière (FSNA ou Français de souche nord-africaine), qui sont 85 000 en 1960. Au total, durant la guerre, l’armée française recense 160 000 contractuels harkis, moghaznis, GMPR (devenus GMS) et un peu plus de 110 000 réguliers11. Le nombre d'Algériens enrôlés ou engagés dans les supplétifs durant toute la guerre varie de 200 000 à 400 000 selon les historiens.
Le , jour du cessez-le-feu, le contrôleur général aux armées Christian de Saint-Salvy dénombre 263 000 musulmans engagés du côté français en Algérie : 60 000 militaires réguliers, 153 000 supplétifs, dont 60 000 harkis, et 50 000 notables francophiles. Avec leurs familles, ils représentent 1 500 000 personnes sur 8 millions de musulmans algériens. Selon Maurice Faivre, on compte quatre fois plus de combattants musulmans dans le camp français que du côté du FLN. Philippe Tripier, officiel du Secrétariat Général de la Défense Nationale, évalue à 3 500 le nombre des soldats musulmans morts pour la France pendant la guerre d’Algérie.
Le critère principal de sélection des harkis est le fait qu'ils ne soient pas proches du FLN. La forme physique n'est pas un critère important : l'idée selon laquelle les harkis sont recrutés pour que leur famille ait un lien avec la France prime. Ainsi, on verra des hommes de plus de cinquante ans être embauchés en cuisine ou pour l'entretien des montures
Motifs de l'engagement
Le choix politique de l’Algérie françaiseest quasiment absent, contrairement au discours rétrospectif des autorités françaises lors des hommages officiels aux harkis. Au contraire, beaucoup de harkis cotisent à l’organisation politico-administrative du FLN.
Souvent, l'engagement volontaire suit l'assassinat d'un membre de la famille du harki par les indépendantistes ou se fait pour fuir des maquisards avec qui ils ont un différend. Dans ce cas, il s'agit d'un engagement contre le FLN, plutôt que pour la France.
Une autre motivation récurrente est le besoin d'argent, un cas répandu en particulier chez les paysans peu informés du contexte politique, parfois pas même conscients que leur pays est en guerre. D'autres personnes s'engagent par fidélité à un clan, un village ou une famille. Beaucoup de jeunes hommes s'engagent dans les harkas pour être dispensés de service militaire et rester près de leurs proches.
Enfin, l'armée française force l'engagement d'un grand nombre de harkis : d'abord, les anciens soldats de l'ALN qui sont capturés et torturés, puis doivent choisir entre l'engagement et l'exécution, et également à la suite de manœuvres volontaires pour compromettre des civils. Plusieurs cas sont recensés dans lesquels un officier fait le tour du village avec un homme dans sa voiture, à la vue de la population : le seul moyen pour cet homme d'échapper au FLN est de s'enrôler chez les harkis et d'être protégé par l'armée française
Rôle dans l'armée française
Les harkis sont toujours rattachés à des unités de l’armée française et commandés par des militaires français. Les textes de l’armée exigent qu’un commandant doit êtrede souche européenne, les FSNA (militaires d’origine algérienne) ne peuvent être que jusqu’à officiers. Le commandement français refuse une structuration des supplétifs qui pourrait se transformer en
armée algérienne, doutant des motivations politiques des harkis. De Gaulle, par exemple, doute de l’intégration des musulmans d’Algérie et dit à Alain Peyrefitte en 1959 :
Si nous faisions l’intégration, si tous les Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcher de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées !.
La défiance de l'armée française envers les combattants musulmans se traduit de plusieurs façons. Les harkis armés le sont d'abord systématiquement avec des fusils de chasse. À partir du , ils reçoivent parfois des armes qui augmentent leur potentiel offensif, comme des fusils et pistolets-mitrailleurs, chose interdite jusque-là pour éviter le vol d'armes. Les armes sont remises aux harkis pour les opérations, mais sont gardées par des unités françaises de souche européenne entre les opérations. Les harkis ne peuvent pas mener des opérations seuls, ni de leur propre initiative, pour éviter l'espionnage, le vol d'armes et la désertion. Les harkas sont toujours commandées par l'armée régulière : le critère de choix de l'encadrant n'est pas son grade, mais son origine européenne. Enfin, l'armée organise régulièrement des
tests de fidélitéauprès de harkis et de leur famille, passant par exemple frapper aux portes au milieu de la nuit en imitant les maquisards pour voir si on leur ouvrira.
L'armée française tient cependant à recruter des recrues musulmanes, afin de faire appel à des personnes qui connaissent le milieu dans lequel ils évoluent. Leurs autres objectifs sont d'ordre pratique : en effet, il ne faut pas laisser des combattants potentiels s'enrôler chez les indépendantistes, ni
donner prise à une facile propagande de l’adversaire qui ne manquerait pas de souligner […] notre impuissance à trouver sur place les volontaires nécessaires. Enfin, il s'agit de créer une émulation de groupe :
La prise de position des harkis qui mènent, à nos côtés, la lutte ouverte contre les rebelles s’accompagne d’un effet psy [sic] certain sur la population locale (ralliements). Par l’intermédiaire de leurs parents et amis, les harkis contribuent soit à entretenir un climat favorable à notre cause dans leurs villages d’origine, soit au minimum à contre-battre la propagande adverse.
Les harkis sont rémunérés 750 F (14,94 €2012) par jour de service, comme les mokhaznis et les membres du GMPR. Ces deux derniers sont logés gratuitements et reçoivent des allocations familiales et de la sécurité sociale, ce qui n'est pas le cas des harkis. Cette différence de traitement donne d'eux une image de
soldats au rabaisauprès des autres services. La rémunération des harkis augmente et atteint 8,25 F (12,99 €2012) en 1960, ce qui reste moins élevé que les autres supplétifs. Enfin, les harkis touchent un jour et demi de congés pour chaque mois de présence, des soins gratuits en cas de blessure et une prime pour accident de travail en cas d'incapacité permanente.
mois de présence, des soins gratuits en cas de blessure et une prime pour accident de travail en cas d'incapacité permanente.
Types de harkas
Harkas classiques
Les harkas, étant rattachées aux unités régulières de l'armée française, sont théoriquement composées de cent hommes. Elles sont en réalité presque toujours divisées en plus petites sections.Tous les harkis ne sont pas armés : beaucoup travaillent pour l'armée dans des emplois civils, en particulier en tant que maçons ou cuisiniers. Pour la plupart, ils participent aux tâches de maintien de l'ordre aux côtés des unités régulières de l'armée française. Les
harkis territoriauxsont des harkis âgés ou blessés, chargés d'assurer la garde du camp.
Plaque commémorative du massacre du à Aubervilliers
Harkis de Paris
En France, l'expression de harkis de Paris désigne, pendant la guerre d'Algérie et à partir du , une force de police auxiliairemise en place par le préfet Maurice Papon. La plupart de ces auxiliaires sont d'origine algérienne et installés dans des quartiers à forte densité algérienne. Ils s'engagent pour six mois, commencent par un stage de 8 jours à Noisy-le-Sec pour apprendre à manier les armes et le fonctionnement du magnétophone pour enregistrer des aveux éventuels.
Ralliés
L'armée française recrute environ 3 000 anciens éléments du FLN et de l'ALN. Après leur capture, l'armée leur donne le choix entre l'exécution ou le service du côté français.Ils forment un groupe de harkis à part, les
ralliés: étroitement surveillés par le commandement, ils sont surtout montrés à des fins de propagande. Ils ont la réputation d'être les plus violents, ayant le plus à perdre s'ils sont capturés par l'ALN. Pour faire pression sur eux, les officiers français les prennent en photo avec eux, ou pendant un interrogatoire, puis les menacent d'envoyer les photos à l'ALN s'ils décident de déserter.
Le commando Georges, un groupe entièrement musulman sous la coupe du capitaine puis général Georges Grillot, est l'un des groupes de ralliés les plus réputés. Il est basé à Saïda et officie selon les méthodes de l'ALN. Divisé en quatre katibas, il compte 30 % de ralliés qui choisissent eux-mêmes leurs sous-officiers. Après la guerre, ils sont torturés et exécutés, sauf quelques-uns qui parviennent à quitter le pays et à rejoindre une ferme en Dordogne, achetée par André Wormser et transformée en centre pour les harkis faisant partie des commandos de chasse.
Commandos de chasse
Les commandos de chasse sont le plus souvent constitués de moins de 10 % de harkis, qui représentent environ 5 % du total des harkis. Les harkis commencent à être intégrés aux commandos de chasse en 1959 : leur nombre n'excède jamais 6 000 harkis. Les commandos de chasse sont créés pour représenter une sorte d'élite de combat. Environ 140 commandos sont créés en Algérie, mais environ la moitié d'entre eux est active seulement.On compte environ autant de harkis chargés des interrogatoires où la torture est pratiquée.
Beni-Boudouanes
La tribu des Beni-Boudouanes, originaire de la rive gauche du Chelif, a peu de contacts avec le monde extérieur pendant l'ère coloniale. Le bachaga Boualem prend la tête de la tribu le premier . Le territoire compte une population d'environ 15 000 personnes, divisées en 24 collectivités autonomes. Le lieu est très reculé et les contacts de la tribu avec le monde extérieur sont rares : certains vieux harkis affirment n'avoir jamais vu de Français avant la guerre. L'appartenance à la tribu dépasse donc toute loyauté extérieure.Un jour, le Bachaga organise une assemblée au cœur du village pour présenter la situation et pousser les Beni-Boudouanais à se défendre contre les indépendantistes. La tribu est menacée par les incursions de
hors-la-loi: la légitime défense est donc adoptée, bien que les habitants ne sachent pas quel bord politique ces envahisseurs représentent. Un harki témoigne :
J'étais sous les ordres du Bachaga, je lui devais soumission et respect, et, donc, si lui, il a choisi le camp de la France, nous, par respect et par choix et par légitime défense, on a été obligé à suivre le Bachaga et à devenir harkis.
Le bachaga Boualem constitue une unité d'environ 1 500 hommes. Elle échappe au contrôle de l'armée française, mais est payée comme des harkis, relève de la harka et bénéficie de conditions de service particulières.
Harkettes de Catinat
En , une harka féminine est créée à Catinat. Les femmes y apprennent à bétonner, à poser des tuiles et à installer des lignes électriques dans la ville assiégée. Le lieutenant Onrupt se décide à armer quelques femmes : sur 34 volontaires, 18 sont retenues pour assurer la protection des récoltes et des convois sur certaines routes, en particulier vers El Milia. La harka est connue sous le nom deharkettes de Catinat. La harka est dissoute en 1961.
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